L'homme-nation


Il ne veut pas d'autorité au-dessus de sa tête, l'homme-nation. Le ciel entier, désormais vierge, n'a pas plus de puissance et d'humilité à lui offrir que les eaux internationales qui desservent de perpétuelles souillures et transactions. Ils l'abattraient même volontiers, ce plafond dégarni. « Pour gagner plus en clarté... », clament-ils, pour une fois, en chœur, les hommes-nations, pour dégager ce qui les sépare encore du néant. Oui, ils voudraient pouvoir contempler la beauté « toute nue » du cosmos ; et plus seulement en poster, mais cette fois allongés sur des transats, à ne rien faire ; « à sucer l'air, les yeux en érection ! » En jurant que cela restera ainsi, éternellement bon...

Malgré tant de provocations, il est souvent bien faible, vous savez, ce peuple récent, cloîtré sous un blouson. Au fond, c'est pour eux qu'il aspire à l'hégémonie, l'homme-nation, « pour la paix », même s'il ne contribue, de cette manière, qu'à multiplier ses adversaires : les autres esclaves condamnés, eux aussi, à rabaisser six milliards d'ambitions... C'est con... Du coup, il n'ose même plus le montrer aux autres, ce peuple-mystère, de peur qu'il finisse rasé de la Terre.

On comprend mieux pourquoi sa mission n'est que violence, l'homme-nation. Suffoquant sous l'aridité de sa vision, son peuple ne lui réclame que de l'arrogance, qu'il pleuve sur lui les larmes extirpées de l'orgueil frontalier.

Mais l'orgueil est un nuage vite à sec, et l'homme-nation devra, par conséquent, les fouiller tous. Même si, finalement, personne n'est dupe, dupe de ces poings minuscules qui lui jaillissent des yeux ! Il n'y a que son peuple pour croire en lui ; croire, là, à des actes de bravoure. Et alors, on rit bien quand il se remet lui-même une médaille. Forcément :

L'homme-nation, c'est le monde à l'envers.



Marot Couperin, à Paris, le 26 nov. 2012