Le
pacifisme est une tendance suicidaire de la mentalité bourgeoise,
puisque tout s'avère, soit d'un côté, stratégie de conquête,
soit de l'autre, résistance au harcèlement résultant de cette
stratégie de conquête. Or, pour le pacifiste, la violence n'est
qu'un penchant auquel il suffirait de renoncer, et le conflit, une
absurdité qu'il faut savoir contourner. Ainsi, en se raisonnant et
en invitant les autres à se raisonner, on avancerait vers la paix.
Mais, ce qu'il croit être de la sagesse n'est qu'une parodie de
« force intérieure », puisqu'il ignore que sa « foi
puissante » en la paix ne découle que d'une carence de force,
justement, issue du fait qu'il ne convoite rien, de part la position
où il se maintient de posséder suffisamment.
Le
pacifiste bourgeois est un inconscient, devenu sot à mesure qu'il
croyait s'élever. Il a perdu de vue que le pacifisme n'est pas une
philosophie qui se réalise à partir de sa fin, mais en
commençant par atteindre un état : en faisant le vide
absolu autour de soi de tout ce qui alimente la rivalité, de tout ce
qui génère les ambitions de conquête ; ce à quoi il ne
renonce jamais, évidemment, puisqu'il
est lui-même, quoiqu'il ne le ressente plus — et c'est peut-être ici la source d'où jaillit son ignorance — prisonnier du système de
la rivalité.
On
ne peut donc sérieusement militer pour la paix quand on possède.
C'est s'illusionner ou berner les autres. On veille sur ses biens, si
on y tient ; on défend ses valeurs tant qu'on y croit, ou, si
vraiment on préfère par-dessus tout ceci qui est entre nos mains,
ne pas se battre, alors on cède tout avant la confrontation, mais en
avouant au passage qu'en vérité on n'était plus lâche que
non-violent.
Le pacifiste participe autant à la gestion de la paix que l'épicurien cultive lui-même les fruits qui satisfont ses désirs...
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